Être chrétien, est-ce être de gauche ou de droite ?

Sachant qu'être chrétien, c'est suivre le chemin du Christ, la question à se poser est: Jésus était-il de droite ou de gauche ?

Une telle question peut sembler oiseuse et elle me le semblait à moi-même encore il y a quelques mois.

Non seulement parce que les notions de gauche et de droite n'existaient pas du temps de Jésus mais surtout parce que ces notions sont très relatives, que les idées qui furent de gauche à une certaine époque devinrent de droite à une autre époque et réciproquement.

Cependant, au-delà de la relativité des différents clivages qui ont pu caractériser la gauche et la droite en différentes époques, il semble qu’il y a quand-même un clivage invariant : le combat entre les anciens et les modernes, clivage qui existait avant même que des parlementaires se positionnent entre gauche et droite.

Et depuis 1789, malgré les aléas historiques, c’est généralement à droite qu’on trouve les adeptes de la conservation et à gauche, les adeptes du changement.

Or, il se trouve que ce clivage existait déjà au sein du Sanhédrin à l’époque du Christ : d’un côté, les pharisiens qui étaient les réformateurs et qu’on peut donc considérer comme la gauche de l’époque et de l’autre, les sadducéens, conservateurs, que l’on peut donc considérer comme étant la droite.

Des Évangiles, on a retenu des pharisiens leur attachement scrupuleux au respect de la loi. Ce qui est tout à fait en cohérence avec leur réformisme : plus on se vante de respecter la loi, plus on a intérêt à en être l’auteur et donc à la réformer sans cesse. Résoudre les problèmes posés par la loi en créant d’autres lois, voilà une attitude typiquement de gauche et c’est ce que firent les pharisiens avant la mort du Christ et plus encore après sa mort, durant des siècles de Talmud, ayant pris le contrôle total du judaïsme suite à la destruction du Temple.

Les sadducéens, quant à eux, étaient beaucoup moins attachés au respect de la loi qu’ils n’avaient aucun intérêt à réformer, ayant appris à s’en accommoder et n’ayant aucune raison d’en créer de nouvelles. D’où leur attitude conservatrice qui les faisaient s’en tenir à la Torah et rejeter tous les ajouts pré-talmudiques des pharisiens.

La gauche pharisienne était tournée vers l’avenir, espérant le grand soir cours duquel le Messie viendrait libérer Israël du joug romain.

La droit sadducéenne était composée de riches notables souhaitant éviter toute agitation politique et tâchait de garder de bonnes relations avec l’occupant romain.

A l’extrême-gauche, les zélotes, telle une branche armée des pharisiens, n’attendait pas l’arrivée du Messie pour organiser la rébellion et aux discussions sur la loi préféraient l’action violente en vue de la victoire contre l’impérialisme romain, l’abolition de la grande propriété et la libération des esclaves. Et les sicaires, tendance la plus extrémiste de cette mouvance, pratiquaient des assassinats ciblés contre des juifs collaborant avec les romains.

A l’extrême-droite, les esséniens se proclamaient les véritables héritiers du grand-prêtre Sadoq dont les sadducéens avaient selon eux usurpés le nom. Sédévacantistes avant l’heure, ils refusaient la fréquentation du Temple occupé selon eux par des usurpateurs et préféraient se couper du monde qu’ils abhorraient en se retirant à la campagne et dans des grottes, tout en proclamant la haine de Dieu contre les pêcheurs juifs, les païens et les romains.

Pour savoir si Jésus était de droite ou de gauche, extrême ou modérée, regardons donc quelle était l’attitude ce dernier vis-à-vis de ces différentes sectes.
• D’abord, on sait avec quelle violence Jésus dénonçait l’hypocrisie et le fétichisme légaliste des pharisiens.
• Et cependant, ce sont les sadducéens qui furent à l’initiative de son procès et donc de sa mise à mort. Inquiets des troubles qu’il pouvait provoquer, ces conservateurs, selon une conception pré-vichyste du patriotisme, craignaient que ce Jésus ne provoque la colère de l’occupant romain et que de cette colère ne résulte la destruction de la nation.
• Ils obtinrent cependant pour cette condamnation le concours des pharisiens. Face à un péril commun, la gauche et la droite savent très bien dépasser leurs clivages pour réaliser l’union sacrée.
• Mais les quelques membres du Sanhédrin qui rejoignirent Jésus étaient des pharisiens : Nicodème, Gamaliel l’ancien, Joseph d’Arimathie.
• Jésus fut aussi suivi par Simon le zélote et Judas le sicaire, mais on le sait, il fut trahi par ce dernier.
• Les Évangiles ne nous disent rien des liens entre Jésus et les Esséniens. Certains historiens pensent que Jésus était issu de cette mouvance. Pourtant, quelle différence radicale entre l’attitude de repli des esséniens et l’appel du Christ à apporter la bonne nouvelle au monde, entre la croyance essénienne en un Dieu haïssant les pêcheurs et le Dieu miséricordieux incarné par le Christ ! Mais ces historiens répondent qu’ils y avaient différents tendances aux seins des esséniens et que les premiers chrétiens était l’une d’elle.

Si on tire enseignement des Évangiles, un chrétien doit donc :
• Dénoncer sans tiédeur l’hypocrisie de la gauche, sa morale frelatée, son légalisme mortifère et son fétichisme réformateur.
• Dans le même temps, se méfier de la droite comme de la peste car les conservateurs, même quand ils prétendent conserver des valeurs, voire des valeurs chrétiennes, ne conservent au final que leur situation confortable et seraient prêts à tuer dix fois le Christ si celui-ci revenait mettre en cause ce confort.
• Ne pas oublier que lorsque la gauche et la droite s’unissent, c’est généralement pour le pire, c’est-à-dire pour protéger les royaumes de ce monde dont Lucifer est le prince contre la menace divine.
• Savoir qu’au sein de la gauche, malgré l’hypocrisie qui y règne, on trouve quelques âmes réellement assoiffées de justice et de vérité, et savoir les accueillir.
• Dans le même ordre d’idées, accueillir les bonnes volontés venant de l’extrême-gauche mais se méfier des gauchistes orgueilleux qui prétendant faire la révolution veulent en vérité faire de la révolution leur chose, qu’ils pourraient contrôler, et que leur orgueil peut les amener à devenir les pires traîtres au service du pouvoir
• Comprendre que l’extrême-droite a raison de dénoncer radicalement la laideur du monde contemporain. Comprendre qu’elle a tort de répondre à cette laideur par le repli et la haine plutôt que par l’amour et la miséricorde. Accueillir les fachos comme les gauchistes pour peu qu’ils renoncent à cette haine et ce repli.

La gauche et la droite, ce sont deux manières différentes de refuser l’avènement du royaume des cieux qui est abolition des royaumes de ce monde.

A droite, les sadducéens entendent préserver ces royaumes par leur posture conservatrice.

A gauche, les pharisiens veulent sauver ces royaumes dans une fuite en avant réformiste.

Les uns comme les autres seront balayés avec l’avènement de la nouvelle Jérusalem.

Le Christ n’est évidemment ni de la droite ni de la gauche car il est le feu divin qui détruit l’une et l’autre.

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